Article écrit par Mira Haj Hassan et Yves Bonis
En 2019, des chercheurs de l’Université de Tilburg aux Pays-Bas ont utilisé des électroencéphalogrammes (EEG) pour mesurer l’activité cérébrale de participants lors d’une expérience en réalité virtuelle (VR). Ils ont constaté une réduction notable des ondes alpha dans les zones frontale, centrale et pariétale du cerveau, des régions clés associées à la concentration et à l’engagement. En d’autres termes, l’activité cérébrale des participants en VR était similaire à celle observée dans des situations vécues dans le monde réel, comme s’ils étaient confrontés à des expériences authentiques.
Concrètement, la VR peut donner l’illusion à votre cerveau que vous êtes réellement assis dans un café à Paris pour apprendre le français ou dans un bar à Madrid pour pratiquer l’espagnol. Cette immersion profonde est un atout majeur pour une formation efficace.
Comprendre les bases neuroscientifiques derrière la VR
Avant de plonger dans les détails des études, il est essentiel de comprendre quelques concepts fondamentaux concernant le fonctionnement cérébral. Le cerveau émet différents types d’ondes en fonction des activités et émotions vécues tout au long de la journée. Parmi ces ondes, les ondes alpha sont particulièrement pertinentes en formation, car elles sont liées à l’état de relaxation et de faible concentration. En VR, la diminution de ces ondes indique une concentration accrue.
Les zones cérébrales surveillées par les scientifiques dans ce cadre sont :
- La zone frontale : responsable de la présence, du contrôle des mouvements et de l’engagement.
- Les zones centrale et pariétale : liées à l’engagement et à la gestion des mouvements dans l’espace.
La VR favorise l’”Embodiment”
Une étude menée par Tjon et al. (2019) a montré que le sentiment de présence des participants en réalité virtuelle (l’illusion d’être dans un lieu virtuel) est associé à une baisse significative des ondes alpha dans la zone frontale. Cette diminution est corrélée au sentiment de présence spatiale, ce qui prouve que la VR favorise l'”Embodiment“, c’est-à-dire l’intégration corporelle dans un environnement virtuel.
La réalité virtuelle et l’engagement cérébral : une immersion totale
Lorsque vous jouez à un jeu en VR, vous pouvez ressentir une immersion si profonde que le monde réel semble disparaître. Cette sensation est due au fait que certaines régions du cerveau, telles que les zones frontale et pariétale, s’activent fortement pour répondre aux stimuli virtuels. Par exemple, lors d’une simulation d’escalade en VR, la zone frontale du cerveau, impliquée dans la planification et le contrôle des mouvements, entre en état de “super-concentration”. La zone pariétale, responsable de la perception spatiale et des mouvements s’active également.
Les chercheurs ont observé que l’activité alpha, qui indique un état de repos ou de faible concentration, diminue en VR. Cela montre que plus l’immersion est forte, plus le cerveau met de côté les distractions pour se concentrer entièrement sur l’environnement virtuel.
Apprendre quatre fois plus vite grâce à la VR
Une étude récente menée par PricewaterhouseCoopers (2024) a révélé que les apprenants utilisant la réalité virtuelle assimilent les informations jusqu’à quatre fois plus vite que ceux qui utilisent des méthodes d’apprentissage traditionnelles. La VR permet de recréer des situations réalistes où les apprenants peuvent s’exercer sans risque, par exemple pour des gestes métiers complexes et/ou stressants. Ce type d’apprentissage engage davantage le cerveau, rendant les informations plus mémorables et facilitant une assimilation rapide et efficace.
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La VR : un booster de créativité
La réalité virtuelle n’est pas seulement un outil d’apprentissage efficace, elle peut également stimuler la créativité. Dans une expérience menée avec 21 participants (Par respect du droit d’auteur, nous n’avons pas uploadé la vidéo explicative de cette expérience sur nos propres serveurs. La vidéo se trouve en milieu de page), leur activité cérébrale a été mesurée pendant qu’ils travaillaient sur des exercices créatifs. Ceux qui étaient immergés dans un environnement VR ont montré des niveaux plus élevés d’immersion, de satisfaction et de créativité que ceux utilisant un simple écran en 2D. Les ondes alpha, bêta et gamma étaient plus actives, favorisant un état cérébral propice à la génération d’idées innovantes.
La VR et les interfaces cerveau-ordinateur : une révolution pour l’imagerie motrice
La VR offre également des perspectives fascinantes dans le domaine des interfaces cerveau-ordinateur (BCI). Ces interfaces permettent de contrôler des dispositifs par la seule pensée, sans mouvement physique. Des études récentes (Gougeh et al., 2023) ont montré que l’ajout de la réalité virtuelle dans les environnements d’entraînement de BCI améliore la reconnaissance des signaux cérébraux,( Brain Training in VR | Enhance) permettant une interaction plus fluide entre le cerveau et la machine. Cette avancée est particulièrement prometteuse pour les personnes amputées, leur permettant de contrôler des prothèses avec plus de précision.
Conclusion
Les avancées en réalité virtuelle et en neurosciences offrent des perspectives révolutionnaires pour la formation, en stimulant à la fois l’engagement, la créativité et la rapidité d’apprentissage. Ils permettent aussi d’avancer vers toujours plus d’inclusion dans la formation. Ces résultats vous inspirent-ils des idées pour l’utilisation de la VR dans vos programmes de formation ? N’hésitez pas à partager vos réflexions en commentaire !
Avec le soutien de nos partenaires académiques : L’ANRT, la Région Rhône-Alpes, l’Université Claude Bernard Lyon 1 et l’Université Lumière Lyon 2.
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Source de l'image : Google DeepMind sur Pexels
Creative as usual mira
Article intéressant !
J’ai une question sur l’utilisation de VR et AR dans la formation militaire.
Dans divers centres de simulation, ces technologies sont utilisées pour offrir à chaque cadet son propre espace physique afin d’opérer et de manœuvrer dans le monde réel, qui est ensuite parfaitement traduit dans un environnement virtuel immersif.
Existe-t-il une étude montrant comment l’absence de risque et de peur impacte les réactions humaines lorsqu’on compare la VR au monde réel?
Bonjour Bassam,
Une étude centrée sur la mesure de la capacité du cerveau à s’immerger et se mettre en situation de stress face à une expérience de réalité virtuelle militaire devrait vous intéresser : il s’agit de l’article de Binsch et al. (2021) https://doi.org/10.1080/08995605.2021.1897494.
Une autre étude, de Harris et al. (2023) https://doi.org/10.3389/frvir.2023.1165030, se porte de son côté sur une comparaison entre une formation en 2D, une en VR et une situation “réelle”. Elle tend à prouver que VR et réel sont plus immersifs que la 2D, mais il est certain que l’apprenant sous casque de réalité virtuelle est moins sollicité que dans une situation réelle.
Cela pose la question de la place de l’outil VR dans la boîte à outils du formateur. Il est évident que l’immersive learning ne remplacera pas toutes les mises en situation réelles avec stress, fatigue et perception d’un risque. Mais elle peut se montrer extrêmement pertinente sur la formation à un certain nombre de gestes techniques, à la mobilisation de connaissances et à la pris de décisions dans des situations d’urgence par exemple.
Si vous avez d’autres questions concernant les usages militaires de la VR avec Speedernet Sphere, n’hésitez pas à nous contacter via le formulaire de contact, en précisant bien que vous souhaitez vous adresser à notre référent défense.
Merci de votre commentaire et au plaisir de vous lire à nouveau,
L’équipe Speedernet Sphere